Francine Charrette schreef in Club-Culture in juni 2000

LE CONTE DU VENTRE PLEIN

Un conte burlesque



France, 1999 Film de Melvin Van Peebles Durée: 105 minutes Version originale en français Interprètes: Andréa Ferreol, Jacques Boudet, Meiji U Tum'Si, Frank Delhaye et Herman van Veen et Claude Perron. L'histoire
Pour remplacer leur fille Blanchette (Claude Perron), partie soigner une tante (un gros mensonge), un couple d'aubergistes, Henri et Loretta, embauchent l'innocente et douce Diamantine, dans un orphelinat pour "jeunes-filles d'Outre-mer". Celle-ci qui a été abandonnée alors qu'elle n'était qu'un poupon, ne connaît rien au monde extérieur et encore moins des hommes!

Pourtant, au fil des mois, le ventre de l'adorable jeune fille noire s'arrondit sous les yeux scandalisés des clients et de tout le village. C'est que Loretta, sous ses airs de " sainte nitouche " entraîne Diamantine à montrer un peu trop à son goût, ses jambes et sa poitrine, pour attirer les clients et attiser les regards des villageois et, pourquoi pas ? Les réprimandes ?

Le cinéaste noir américain Melvin Van Peebles, fils de Mario Van Peebles, acteur, musicien, romancier, journaliste, scénariste et réalisateur, pionnier du cinéma noir et précurseur du rap, nous présente un conte fabuleux, "Le conte du ventre plein". Une fable gonflée et étonnante sur une jolie ingénue noire, d'une mansuétude peu commune, nommée Diamantine qu'il a tournée en France, plus de 30 ans après son premier film.

L'entrée en matière, gros plans sur une gouvernante pincée, mielleuse, vieille fille typique. On entre dans une pièce sombre et délabrée, les planchers et le murs sont croches, l'esprit aussi !

Un couple âgé : une femme outrageusement maquillée avec ses breloques et son goût pour les couleurs criardes, autoritaire et hypocrite, un mari qu'elle n'aime pas, bedonnant, un peu mou, au regard prédateur. Tous les personnages traditionnels qui marquent le " conte " y sont : la marâtre un peu sorcière et son complice un peu innocent, l'anti-héros, le chevalier et l'être pur, vierge innocente et tendre.

En prenant la décision de tourner en vidéo, Peebles a pu se permettre des fantaisies et ainsi obtenir une vraie fête visuelle. Des images filmées en accéléré, surimpressions, distorsions, changements de couleurs, des éclairages audacieux qui nous donnent des atmosphères surréalistes.

Un conte audacieux tant par son contenu que par le traitement. Peebles utilise sa caméra comme s'il dansait et parfois ses images sont de vraies arabesques.

"Diamantine", la petite chocolatine aux sourires angéliques et aux yeux de biche a un cœur d'or. Elle est simplement reconnaissante et heureuse d'avoir trouvé une famille qui l'accueille comme leur fille et un bon travail. Le couple d'aubergistes sont des personnages caricaturés. Nous sommes en présence de guignols grotesques avec tout ce monde étrange qui tourne autour, feignant la gentillesse et la bonté. Une étrange complicité s'installe au fil du temps mais elle s'effrite rapidement quand la vérité éclate….

Dans un conte tout est possible et c'est exactement ce que Peebles a réussi. Les règles sacro-saintes sont ignorées pour laisser place au coup de foudre, l'inspiration, l'originalité et la liberté de l'image.

Peu de cinéastes osent toucher le "conte". Pourtant, c'est le médium idéal pour voyager dans un monde parallèle où il n'y a pas de limites !

Bon cinéma!